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Mot du président

Chers confrères,

Vous avez déjà pu le lire à plusieurs reprises dans cette Tribune : le nouveau Code de droit économique, qui entre en vigueur progressivement, va nous obliger à modifier nos pratiques. Certaines de ses nouvelles dispositions peuvent paraître contraignantes et, dans plusieurs hypothèses, elles paraissent mal adaptées à notre profession, ce que nous avons signalé, parfois en vain, au législateur avant qu’il les adopte, et que nous continuerons de lui répéter, dans les prochains mois, en vue d’obtenir des amendements et des adaptations.

Mais tout ne doit pas être critiqué.

Ainsi en est-il du livre XVI, « Règlement extra-judiciaire des litiges de consommation », qui transpose dans notre droit la directive 2013/11/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013, qui a pour but de permettre à tout consommateur, dans tous les pays d’Europe, de soumettre le litige qu’il a avec un professionnel à une entité de règlement extra-judiciaire des litiges.

En deux mots, il s’agit de permettre à tout particulier, client d’un avocat (ou bien sûr, de tout autre professionnel) de soumettre à une autorité de conciliation indépendante tout litige qu’il a avec celui-ci.

Un seul préalable est exigé : le particulier doit d’abord avoir effectué une première démarche auprès du professionnel, pour essayer de résoudre le conflit.

Au-delà, pour les professions, le choix est simple : ou elles organisent leur propre organisme de règlement extra-judiciaire des conflits et ce sera naturellement à celui-ci que les clients devront s’adresser. Ou elles n’en organisent pas, et le traitement de ces conflits sera confié à un organe étatique. Excès ?

Bon, pour nous, la question est importante. Nous sommes, dans le traitement de dossiers qui nous sont confiés, des agents astreints au secret professionnel et nous pouvons donc difficilement admettre que les conflits qui nous opposent à nos clients soient gérés par une autorité qui n’y est pas soumise et n’en maitrise d’ailleurs pas les finesses.

Vous me direz que les Ordres n’avaient pas attendu le Code de droit économique pour organiser de tels mécanismes de médiation ou de conciliation. C’est vrai, en tout cas pour plusieurs d’entre eux.

Mais le Code de droit économique nous forcera à une avancée. En exigeant un organisme uniforme, fonctionnant avec des règles uniques, il nous amènera à une meilleure organisation de cette conciliation. Ce devrait être un bien pour tous : pour nos clients mais aussi pour nous, puisque le règlement amiable de tous ces conflits ne peut que nous aider dans la gestion quotidienne des difficultés que nous rencontrons avec nos clients récalcitrants.

Nous proposerons d’ailleurs que les avocats prennent largement place dans ce nouveau concert. Il est certain que l’idée de la Commission européenne n’est pas, en mettant en place ces modes extra-judiciaires de résolution des conflits, d’ouvrir un nouveau marché aux avocats. Mais il n’appartient qu’à nous de ne pas nous en laisser exclure. Nous pouvons aussi mettre sur pied nos propres centres de règlement extra-judiciaire des litiges et nous pouvons aussi assister nos clients dans le cadre de ces procédures. C’est aussi un des objectifs que nous nous donnons pour l’année judiciaire prochaine.

L’avocat de demain ne travaillera plus tout à fait comme travaillait celui d’hier. C’est une réalité qui devient de plus en plus évidente.

Le monde change, le monde avance. Il nous appartient d’avancer avec lui et même, autant que nous le pouvons, de lui imprimer une orientation respectueuse de notre profession et des valeurs qu’elle incarne.

Comme le disait un ancien bâtonnier, prenons nos affaires en main.